Sommes-nous tous malades ? La médecine, ses approches de l’humain, son vocabulaire ont pénétré dans notre univers quotidien. Une telle médicalisation de notre existence n’est pas sans effet. Les problèmes du corps et de l’âme se voient systématiquement redéfinis en pathologies et les différentes phases de la vie accompagnées de l’aide technique médicale. Celle-ci esquisse la figure d’un homme amélioré par les biotechnologies, débarrassé des aléas des passions, maîtrisant ses colères et ses pulsions : un homme sans fièvre. Ainsi paradoxalement, à mesure que la médecine identifie toujours plus de maladies, les hommes rêvent de parfaite guérison et en font à la fois une exigence personnelle et un idéal social. Guérir la société de ses blessures, nous défaire de notre vulnérabilité ; telle est la manière dont est interprétée trop rapidement l’idée d’une société du soin proposée par de nouvelles philosophies. Pourtant, soigner n’est pas un geste anodin, guérir ne se fait pas sans souffrance et généraliser le modèle médical, c’est aussi prendre le risque de banaliser sa violence spécifique.
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